Lévitique chapitre 12/3 : "Et le huitième jour, il circoncira
la chair de son excroissance."
Ce commandement réalisé par Abraham à l'age de
99 ans revêt un caractère paradoxal : Bien qu'il soit difficile
et douloureux à réaliser, il est pourtant le plus répandu.
En effet, un Juif qui aurait peut-être même déjà
délaissé l'accomplissement du Grand Pardon sera encore viscéralement
attaché à circoncire son fils.
Nous nous proposons lors de cette étude de comprendre les raisons
de ce commandement et l'état d'esprit qui accompagne son accomplissement.
Dans la Torah la circoncision est appelée Berith - alliance.
Le Pa'had Yitshak, grand penseur juif contemporain, fait remarquer que
deux seules choses dans la Torah sont désignées par le terme
Berith - alliance. L'une est, la promesse que D. a faite à
l'humanité de ne plus envoyer de déluge sur le monde, l'autre
la circoncision. Ainsi, qui dit alliance, dit contrat de fidélité
absolue de la part de celui qui l'a fait. C'est donc que la circoncision
est un engagement éternel de l'homme vis à vis son Créateur.
Mais alors, de quel engagement s'agit-il et pourquoi s'exprime-t-il par
la circoncision?
Le "Hinoukh", grand maître médiéval, dans la deuxième
mitsva de son livre, semble répondre à notre interrogation
: "...l'origine de ce commandement provient de ce que D. a voulu fixer
chez le peuple qu'il a distingué un signe fixe dans son corps afin
de le différencier des autres peuples sur le plan physique au même
titre qu'il l'est du point d vue spirituel... (et cette différence
se situe au niveau de l'organe de reproduction car il est l'origine du
maintien de l'humanité), et il y a dans cet acte un parachèvement
du corps de l'homme... et D. a voulu que ce parachèvement soit réalisé
par l'homme et ne l'a donc pas créé parfait dès sa
naissance. Ainsi, l'homme doit comprendre que de même que son corps
sera parachevé dès sa naissance, il se devra de parfaire
son âme par ses actes."
Il existe donc un double sens dans la circoncision. Tout d'abord, elle
consiste à marquer au niveau de l'organe de procréation,
siège du désir, un signe qui rappelle notre différence
de constitution spirituelle. Ensuite, elle doit susciter en nous un désir
de se parfaire d'un point de vue spirituel. C'est peut-être cette
quête de spirituel qui mérite de façon même inconsciente
le Juif le plus éloigné.
Nos sages considèrent l'acte de la circoncision, acte que le
père est sensé réaliser lui même, comme la première
obligation éducative. Or, la cérémonie de la circoncision
est toujours accompagnée d'une se'oudat mitsva, c'est à
dire d'un repas honorant l'événement. Cette cérémonie
semble prendre sa source chez Abraham qui, après avoir circoncis
son fils Isaac, fit un grand festin chapitre 21/8 : "Et il fit un grand
festin le jour où Isaac fut sevré."
Sevré, étant exprimé par le mot ; higamel
. - Ainsi, les tossafistes dans le traité talmudique Chabbat font
remarquer que le verbe higamel peut être lu `hé'
`guimel' , c'est à dire d'après le système de
numération des lettres : Hé - Guimel= 5+3=8. Il s'agit donc
du huitième jour et non du jour de sevrage.
Il y a donc apparemment divergence de sens entre le sens littéral
et le sens allusif, puisqu'un enfant est sevré bien après
sa circoncision? En fait, on peut dire qu'il n'y pas de contradiction mais
éclaircissement de sens. C'est au moment où le père
s'apprête à réaliser son premier acte éducatif
à l'âge de 8 jours qu'on lui dit : ce jour doit aussi être
un jour de sevrage; c'est à dire un jour où l'enfant prend
sa première autonomie.
Autrement dit, la Torah vient nous enseigner un principe fondamental
de l'éducation: un acte éducatif ne doit pas viser à
atteindre exclusivement la ressemblance de l'enfant au modèle parental
mais son indépendance et son autonomie.