Mr Eric Attal,
Jérusalem
Commençons par relever une question sur le nom de cette paracha : comment se fait-il que la Torah donne le nom d'un racha, d'un personne vicieuse, à une de ses sections? Balak, le roi de Moab était un homme qui voulait tout le mal possible au peuple de D'; d'où lui vient donc ce mérite ?
Rachi (un des commentateurs principaux de la Torah) explique ainsi : les idolâtres, ont l'habitude de faire taire leurs sentiments véritables en présence des juifs, mais de les maudire dans leur coeur. Tandis que Balak, roi de Moab, ne cachait pas sa haine. Au moins là il était vrai et "honnête".
Et c'est par ce mérite que la paracha peut porter son nom...
Le roi Balak fait appel à Bilam, prophète des nations, pour maudire le peuple d'Israël. Mais Hachem ne 1'autorise pas, et Bilam ne peut que bénir le peuple. Dans un de ses oracles, il déclare : "qu'elles sont belles tes tentes, O Jacob ! ".
Qu'est-ce que Bilam a vu pour lui faire faire cette remarque ? De quelle beauté parle-t-il ici? Probablement il ne faisait point allusion à la beauté des tissus ou à la propreté du camp.
En effet Bilam était impressionné par une beauté bien différente! Les Bné lsraël vivaient, comme l'époque le voulait, dans des tentes. Toutefois, les demeures du peuple juif avaient cette particularité qu'aucune entrée d'aucune tente ne donnait sur celle des voisins. Elles étaient disposées de telle façon que chacun gardait sa propre intimité. Cette pudeur est à leur éloge, et ce jusqu'à nos jours.
La tsniout (pudeur) est une particularité du peuple juif, comme cela le fut au temps de Balak. Cette vertu se retrouve déjà bien avant dans le temps. Lorsque trois anges viennent voir Abraham, ils lui demandent : où est Sarah ? Et au patriarche de répondre simplement : dans la tente... Nos maîtres lisent ici non pas une simple indication de lieu mais une révélation de la nature réservée de Sara. Ceci pour nous confronter aussi à la notion de la pudeur, et notamment chez une femme.
Au fond qu'est-ce que la tsniout ? Aujourd'hui, comment se traduirait-elle ? Est-ce être habillé à l'époque 1900 ?
Non! La Torah , certes, ordonne aux femmes certaines lois, comme se couvrir les cheveux après le mariage, les coudes les jambes... Mais cela ne n'est pas l'essence. L'habit à lui seul ne garantit pas encore la qualité de la tseni'outh.
C'est aussi et surtout un comportement général : ne pas crier dans la rue, ne pas manger n'importe comment dans la rue, ne pas s'habiller de façon criarde... Bref de garder sa dignité. Le juif a le statut de prince et il se doit de se comporter comme tel. Il est donc juste d'une certaine façon de dire que la pudeur est l'expression du caractère royal du peuple!
La tsniout, est aussi une certaine discrétion envers autrui. Beaucoup de gens posent -peut-être d'une façon innocente mais pas moins gênante pour autant...- des questions indiscrètes, ils veulent tout savoir. Cela met souvent les personnes interrogées devant un dilemme : mentir ou ne pas mentir. Comment répondre sans se mettre soi-même et son vis-à-vis dans l'embarras, sans vexer..? Il serait bon que ces personnes prennent le temps de réfléchir et apprennent à mettre de côté leur curiosité, à se maîtriser, ça aussi fait partie de la tseni'outh.
Pensons aux tentes que Bilam a tant admirées.
J'ai entendu une histoire authentique, illustrant cette vertu, racontée par Rav David PINTO, de Lyon.
Au temps de l'inquisition, des curés avait arrêté un couple âgé et leur fille. Leur sort fut vite scellé.
Les parents furent brûlés sur le bûcher, tandis que pour la jeune fille, ils avaient d'autres projets. Ils lui promirent la vie sauve, à condition qu'elle se convertisse.
La jeune fille refusa. Ils décidèrent, pour la convaincre, de l'attacher à un cheval, et ainsi elle serait traînée dans toutes les rues de la ville, et par la même elle servirait d'exemple. Avant d'être attachée, elle réclama des épingles. Ils hésitèrent, puis cédèrent à sa demande. Ils furent subjugués par ce qu'elle fit : elle accrocha tout le bas de sa robe à sa chair, à l'aide des épingles. Lorsqu'ils la questionnèrent, elle répondit simplement que lorsque le cheval la traînerait sur le sol, sa robe se soulèverait, ce qui était impudique.
Même à quelques minutes de la mort cela restait son souci principal.
Ils lancèrent la bête. Soudain elle fit de grands gestes pour arrêter l'animal. Heureux, persuadés que la mort et la douleur avaient fait changer d'avis la jeune fille, ils obtempérèrent et lui disaient : "Etes-vous prête à présent pour la conversion? " Elle leur répondit : " Non pas du tout Je vous ai demandé d'arrêter le cheval car une épingle s'est décrochée "; et elle la remit en place. De rage, ils lancèrent la bête à toute vitesse, jusqu'à ce que mort s'en suive. Al kidouch Hachem, pour la sanctification du Nom de D...
Cet exemple impressionnant était il y a 500 ans. Et de nos jours,
que pouvons nous voir autour de nous ? Tout est dépravation, tout
est mis à nu. Le mouvement idéologique du monde profane est
que tout doit être dévoilé rien ne doit rester caché.
La pudeur est une vertu qui s'est malheureusement perdue, mais pas pour
tous. Il y a plus de trois mille ans, nous reçûmes une éloge,
justifiée. A nous de continuer à la mériter et de
porter très haut le drapeau de la tsniout, d'en être
fier, et que ce mérite nous apporte la délivrance définitive,
avec la construction du BEIT HAMIKDACH, amen.